_celui-là, je le garde

peinture, panneau de fibres à densité moyenne (MDF)

70,5 x 62,5 x 4,5 cm

Dans le cadre de la série d'expositions collectives "Première Presse"

@L'adresse du Printemps de Septembre

2019

 

 

Mon travail commence souvent par porter mon attention sur des objets, regarder leur condition d’existence, leur cycle d’usage.

 

Il s’agit ici d’un socle fabriqué pour l’exposition de Bruno Gironcoli (1936-2010) au Couvent des Jacobins, dans le cadre du festival “Le printemps de septembre 2018”.

Il est composé de tasseaux pour la structure et de panneaux de médium pour l’habillage.

 

Le commissaire de l’exposition, Christian Bernard avait pensé douze socles de dimensions différentes pour poser certaines sculptures de l’artiste.

 

Leurs constructions a été confié à une entreprise.

Ils devaient être peints en noir brillant, pour donner un aspect miroir.

 

Faisant partie de l’équipe de régie j’ai effectué cette tâche en binôme avec un autre régisseur (Clément Capdevielle).

La technique et les produits utilisés furent ceux de la peinture de carrosserie automobile.

Je suis familier avec ces pratiques du fait d’un apprentissage en carrosserie automobile effectué au début de mon cursus.

Leur transport et installation furent une opération délicate à laquelle j’ai participé.

Une fois les sculptures posées et l’exposition ouverte, lorsque j’ai parcouru l’espace il m’est apparu difficile de me concentrer sur les oeuvres.

 

De part mon implication dans leurs fabrications, les socles et leurs petits défauts monopolisaient mon attention.

Quelques mois plus tard, j’ai participé au démontage de l’exposition.

Ces socles sont à usage unique, ainsi leur manipulation et leur transport sont devenus moins contraignant.

Ça frotte, ça cogne, pas de problème.

 

Que faire alors, de ces socles, ils ont été donnés à la «récupératèque des beaux-arts».

En soit, ce sont des objets de faible intérêt pour la récupération.

Le médium (MDF) est un matériau composite à base de bois.

Les couches de peinture les recouvrant encrassent et usent les lames des machines de découpe.

Leur fabrication a eu un coût conséquent (achat du bois, prestation des constructeurs, des peintres) mais un mois plus tard, ça n’intéresse plus personne.

 

Tout de même, ces objets m’intriguent, on croirait des sculptures de John McCracken, mais un oeil averti ou tatillon ne manquera pas de constater de-ci de-là, des différences de brillances, quelques discrètes malfaçons, coulures et autres rayures. Ils ont un aspect très correct, mais nous sommes loin de la rigueur industrielle des sculptures minimale de l’époque.

 

J’en récupère un.

Plutôt haut, pas trop large (140x71x62,5cm) il ne sera pas trop compliqué à transporter.

 

_ celui là, je le garde _

Je me dis qu’après tout, j’en ferais bien quelque chose, et au pire, s’il m’encombre, je l’amènerais à la déchetterie.

Pour le transport jusqu’à chez moi, pas de préoccupation particulière, je le déplace seul, alors je le beugne et le raye un peu plus.

Je constate qu’après les dernières manipulations, le volume n’ayant pas de fond, la structure assemblée à la cloueuse pneumatique, commence à montrer des signes de faiblesse.

Je décide de lui ajouter un fond, avec un morceau de médium bleu qui se tient à ma disposition, cela renforcera la structure et le rendra plus facilement transportable.

Après une semaine dans l’entrée de mon atelier, un réagencement de l’espace remet en question l’utilité de garder l’objet.

 

L’achat récent d’une nouvelle scie sur table, n’ayant pas de support stable, viendra donner une utilité à l’objet.

Posé sur le flanc, il constitue un banc de découpe plutôt stable, à une hauteur ergonomique.

L’organisation de la série d’expositions des dîplomés de l’isdaT, Première Presse, s’organise.

Il y aura un moment d’exposition à l’Adresse du Printemps de Septembre.

 

C’est le moment idéal pour faire resurgire l’objet. L’Adresse du Printemps de Septembre est situé juste à gauche en sortant des Beaux-Arts, c’est le bureau du festival sus-nommé.

 

 

J'ai ensuite décidé d'extraire des peintures de ce socle en le découpant en six panneaux.

Un de ces panneaux recevera une couche de peinture puis de ponçage afin de faire ressortir, en stratigraphie, lles couches, l'histoire de l'objet.

 

Le circuit de l'objet décrit dans ce texte est alors traduit en schéma et collé, au verso de la peinture.

 

La peinture est accrochée sur la tranche et possède deux faces témoignant du cheminement de cette objet

_par le rationnel coté pile _par le sensible coté face.